Je réagis aux événements racistes de ces derniers temps . Ma propre fille est adoptée, malgache, à la peau noire. Je ne lui ai pas conseillé le karaté, comme la mère de Cadleen Désir, pour se défendre mais je lui ai donné un prénom très classique (peut être pour brouiller les pistes), je lui ai appris à ne pas provoquer, à parler avec un vocabulaire soigné, je lui ai toujours conseillé de garder ses papiers sur elle, d’être facilement joignable, de ne pas répondre aux remarques désagréables. De ne pas s’offusquer quand on lui demande d’ouvrir son sac à l’entrée des grands magasins, quand on fait des commentaires tout haut sur ses cheveux Afro, quand on lui demande si elle parle l’africain. J’ai aussi essayé de lui transmettre la fierté de ce qu’elle est, de ses origines, sa couleur. Je suis blanche. J’ai rarement connu le racisme, et les fois ou il m’a concernée, par quelques gestes , paroles jugeantes ou réactions de rejet, je me suis sentie rabaissée, affaiblie, en insécurité . Ma propre fille compose avec cela bien plus souvent que moi. Elle forge sa personnalité avec cette donnée là. C’est son chemin. Mais même si le racisme sévit toujours beaucoup trop, les différences sont de plus en plus acceptées, accueillies avec bienveillance et même appréciées. Ma fille et ses amis de toutes origines, de toutes couleurs de peau se baladent la tête haute, de plus en plus libres d’être ceux qu’ils veulent être. Ce n’était pas le cas il n’y a pas si longtemps, et c’est encore certes trop fragile. Alors, comme mon amie Cadhleen a confiance et peur pour ses garçons, j’ai confiance et peur pour mes filles, l’une blanche, l’autre noir. Je veux pour elles un monde plus juste, respectueux de chacun, quelques soit son genre, son origine, sa peau, son physique, sa sensibilité… C’est pour cela que je vis, pour cela que j’avance, pour cela que j’écris et que je travaille. Je veux que mes filles appellent leurs enfants du prénom qu’il leur plaira, qu’elles n’aient pas autant peur de la police que d’agresseurs divers, qu’elles deviennent des femmes autonomes et sûres d’elles, quelque soient leur spécificités, qu’elles soient fières de leur unicité. Que leur lumière intérieure rayonne et efface la peur extérieure.
